A l’heure où mon pays s’éveille,
A l’heure où frémit la campagne,
A l’heure où pointe le soleil
Sur les toits noirs de la Fréanne,
A l’heure où, sur un coin de nappe,
Tu romps le pain et tu le beurres,
Quand du café au lait s’échappent
Mille volutes de bonheur,
A cette heure là, je t’aime,
A cette heure là, je t’aime.
A l’heure où ton regard découvre
Les longues branches de ton saule,
Les tendres poussent qui le couvrent
Comme une écharpe sur l’épaule.
A l’heure où tes mains se promènent
Sur le coton doux des plumeaux,
Quand les tulipes se prosternent
En voyant les poissons dans l’eau.
A cette heure là, je t’aime,
A cette heure là, je t’aime.
Quand le couvercle des marmites
Ne peut retenir le fumet
De tes plus belles réussites :
Une blanquette ou un civet,
A l’heure où la cloche marine
Sonne le rappel des enfants,
Quand tu parais de ta cuisine
Visage inquiet mais coeur content,
A cette heure là, je t’aime,
A cette heure là, je t’aime.
A l’heure où l’ombre des lauriers
Dessine sur nos peaux des caresses,
Quand le parfum de nos rosiers
Nous incite à plus de paresse,
A l’heure où l’oiseau vient nider
Sous les poutres du four à pain,
Et quand dessus l’herbe coupée
Se tient un conseil de lapins,
A cette heure là, je t’aime,
A cette heure là, je t’aime.
A l’heure où le soleil s’éteint
Sur le clocher de notre église,
Quand du labeur rentre chacun :
Jean-Paul, Alain, Jacques ou Denise.
A l’heure où crépite le bois
Dans l’âtre qui chauffe nos joues,
A l’heure où les enfants, de joie
Viennent sauter sur nos genoux,
A cette heure là, je t’aime,
A cette heure là, je t’aime.
Quand las, dans la nuit silencieuse,
Nous reposons sur le grand lit,
Quand tu me dis « je suis heureuse »
Alors, moi, je le suis aussi.
A ces heures, aux autres encore,
La nuit, le jour, l’hiver, l’été,
Quand tout frémit ou quand tout dort
A ces heures là, je veux t’aimer
A cette heure là, je t’aime,
A cette heure là, je t’aime.