Si j’ai assez de temps, je vous ferai trembler,
A gros frissons, à chair de poule, par surprise,
En décrivant la guerre, les obus qui irisent
Dans le bruit et les cris. A l’abri des remblais,
Des poilus mutilés, en sang, qui agonisent
En gémissant tout bas, qu’on évacue d’emblée.
Si j’ai assez d’envie, je vous fais saliver,
A la paix revenue, au retour aux chaumières,
Des soldats aveuglés qui revoient la lumière,
Et un miraculé, tous ses sens ravivés,
Convalescent, soigné par la belle infirmière,
Et un amour qui nait, un futur activé.
Si j’avais du talent, je vous ferais pleurer,
A chaudes larmes, parlant du mariage,
De mairie et d’église, de la nuit, du voyage,
De saut dans l’inconnu pour le couple apeuré,
Du quotidien banal, la vie sans coloriage,
De son infirmité seulement effleurée.