Si tout cela n’était au fond que gribouillage,
Des esquisses bâclées, de vulgaires brouillons.
On prépare un potage, il n’en sort qu’un bouillon.
On espère un dessin, ce n’est qu’un barbouillage.
Avec de tels écrits, j’ai peur que nous rouillions,
Usant les mêmes mots, que nous vadrouillions
Sans jamais réussir à sortir du brouillage.
Si l’ambition est d’inventer un langage
Pour nous permettre enfin d’abattre les cloisons
De nos sens appauvris, si nous l’apprivoisons
Pour que nos nouveaux mots se changent en images,
Qu’ils ne soient plus lancés à tort et à foison,
Mais qu’ils se propagent comme fait un poison,
Et qu’ils vous stupéfient avec leur doux tangage.
Si l’on doit s’en tenir à faire un étalage
De mots, on ira droit à la déception.
Dans ce cas, il faudra que nous acceptions
Les adieux aux vers, le départ en voyage
Vers une Abbyssinie, et sans exception,
Le retour et la mort à la Conception,
Pour imiter Rimbaud, rester dans son sillage.